L'Irlande défend à Strasbourg son droit à interdire l'avortement

L'Irlande a défendu, mercredi 9 décembre, devant la Cour européenne des droits de l'homme sa législation sur l'avortement, l'une des plus restrictives d'Europe.
La Cour de Strasbourg examinait la requête de deux Irlandaises et d'une Lituanienne qui affirment que la loi irlandaise a mis leur vie en danger, les a soumises à des traitements inhumains, a violé leur droit au respect de leur vie privée et constitue une discrimination fondée sur le genre.
Les trois femmes, qui mettent en avant des problèmes médicaux et sociaux pour justifier leur refus de mener à terme une grossesse non désirée, avaient dû se rendre au Royaume-Uni pour avorter, l'Irlande n'autorisant cette opération que si la vie de la mère est en danger.
Paul Gallagher, Attorney general – conseiller juridique en chef – du gouvernement irlandais, a estimé que ces requêtes visaient à "saper" les principes de la Cour. "Cette Cour, pendant cinquante ans, a reconnu la diversité des cultures et des coutumes en Europe. Elle a reconnu qu'un fœtus avait le droit à la protection de la Convention."
Il a également rappelé que l'Irlande avait fait du maintien de sa législation sur l'avortement une "condition préalable" à la tenue d'un second référendum sur le traité de Lisbonne et avait obtenu des garanties en ce sens de ses partenaires au sein de l'Union européenne.
"NE TOUCHEZ PAS A L'IRLANDE"
Mercredi, une dizaine de militants anti-avortement manifestaient devant la Cour en arborant des pancartes proclamant, entre autres, "Hands off Ireland" ("Ne touchez pas à l'Irlande"). Autre conseiller du gouvernement de Dublin, Donal O'Donnel a estimé que la loi irlandaise protégeait le droit à la vie, garanti par la Convention européenne des droits de l'homme.
"Quand commence la vie ? Là-dessus, il n'y a pas de consensus", a-t-il fait valoir. L'avocate des requérantes, Jule F. Kay, a expliqué les raisons qui avaient amené ses clientes à renoncer à leur grossesse.
L'une, ancienne alcoolique et chômeuse, vivait en dessous du seuil de pauvreté et tentait de récupérer la garde de ses quatre enfants lorsqu'elle est tombée enceinte. L'autre craignait une grossesse extra-utérine et n'était pas prête à élever un enfant seule. La troisième était en phase de rémission d'un cancer et craignait une rechute."Les requérantes ne demandent pas à cette Cour de déterminer quand la vie commence. Elles demandent la protection de leurs droits", a plaidé l'avocate.
La juridiction du Conseil de l'Europe rendra son arrêt d'ici quelques mois.
Source : LeMonde