Italie : quand l'objection de conscience à l'IVG continue de progresser

Face au nombre croissant de gynécologues objecteurs de conscience, les services pratiquant les interruptions volontaires de grossesse (IVG) ferment. Des affiches placardées à l’entrée des services indiquant qu’ici, « on ne fait plus d’IVG », des patrouilles de volontaires attendant les patientes pour les dissuader d'avorter.
Le nombre de gynécologues conservateurs, qui profitent de «l'objection de conscience» et refusent les IVG, se situait en 2008 à près de 70 %. Aujourd'hui il augmente encore. Selon l'Institut national des statistiques (Istat), 80 % des gynécologues transalpins et 50 % des anesthésistes et des infirmiers refusent de pratiquer des IVG. Quelques exemples ? Dans le Latium, la région qui entoure la cité éternelle, 91 % des spécialistes se déclarent objecteurs de conscience. Dans le sud profond, à Bari, chef-lieu des Pouilles, les deux derniers gynécologues qui acceptaient encore de pratiquer des interruptions de grossesse ont jeté l’éponge. Mis à l’index par leurs collègues, harcelés par les volontaires des associations pro-vie, ils n’ont plus tenu le coup moralement. À Naples, enfin, un seul service hospitalier est encore ouvert et en Sicile, le taux d’abstention des spécialistes frôle la barre des 80,6 %.
Certains pointent du doigt le report vers d'autres pays ou l'avortement clandestin : « Les femmes qui en ont les moyens vont en Suisse, en Angleterre ou en France, les autres se débrouillent avec [...] le marché noir », déclare un gynécologue romain objecteur de conscience sous couvert d’anonymat. L’absence de chiffres officiels, le ministère de la Santé ayant « oublié »de publier ses données sur le nombre de femmes hospitalisées suite à une tentative d’avortement clandestin depuis quatre ans ne permet pas de connaître l'ampleur du phénomène. On sait en revanche que le nombre d'avortement a considérablement baissé, passant de 234 801 en 1982 à 121 406 en 2008.
Le parti démocrate a demandé au ministère de la Santé de publier un rapport au moins sur les deux dernières années. Au sénat, les démocrates ont déposé une motion réclamant l’intervention du gouvernement et la pleine application de la loi 194 sur l’ensemble du territoire. Le texte propose le recrutement de personnel favorable aux IVG, l’ouverture de planning familiaux et l’application des interruptions pharmacologiques de grossesse. Les centristes, pour leur part, ont demandé au ministre de la Santé, Beatrice Lorenzin, d’intervenir au Parlement dans le cadre d’une discussion sur l’avortement clandestin. Reste à voir comment réagira cette dernière, très proche des associations pro-vie.
Source : le quotidien du médecin, le Parisien