Québec : un député conservateur veut rouvrir le débat sur l'avortement

Le député conservateur de la Saskatchewan, Brad Trost, estime que le débat sur l'avortement au Canada est rouvert, maintenant que le gouvernement Harper a décidé de financer à nouveau l'International Planned Parentood Federation (IPPF), un organisme spécialisé dans la planification des naissances.
Dans une entrevue accordée mercredi à l'émission Power & Politics, sur les ondes de CBC, M. Trost a affirmé que la décision de la ministre Bev Oda de financer l'IPPF, à laquelle il s'oppose, va délier la langue des députés qui sont contre l'avortement.
« En ravivant le débat comme ils l'ont fait en finançant l'IPPF, vous allez voir plus de politiciens comme moi aborder ce sujet. Ce sera fait avec respect, mais ce sera discuté », affirme Brad Trost.
Le gouvernement adopte une position d'indifférence [envers l'avortement], et je ne crois pas que ce soit approprié. Je crois que c'est une question de droits civiques sur laquelle nous devons nous pencher.
Après avoir été privé de fonds fédéraux en 2009 et 2010, l'IPPF vient de recevoir 6 millions de dollars de l'ACDI pour mener diverses activités d'éducation sexuelle et de promotion de la contraception en Afghanistan, au Bangladesh, au Mali, au Soudan et en Tanzanie.
Il s'agit dans tous les cas de pays où les avortements sont illégaux, sauf dans les cas où la vie de la mère est en danger. Le financement à l'IPPF a repris parce que la demande de subvention respecte les critères du programme pour la santé des mères dans les pays pauvres, que le gouvernement Harper a dévoilé lors du sommet du G8, l'an dernier.
Les fonds fédéraux alloués dans le cadre de ce programme ne doivent pas être utilisés pour pratiquer des avortements. La demande de l'IPPF respecte ce critère, mais le député Trost s'y oppose tout de même, parce que l'organisme continue de pratiquer l'avortement dans d'autres pays que ceux pour lesquels il a reçu des fonds fédéraux.
Un enjeu au Canada aussi
Lorsqu'on lui demande si son combat contre le financement de l'IPPF aura des répercussions au Canada, M. Trost répond : « Je crois que ça va prendre de l'expansion, en raison de la décision d'un juge d'Edmonton dans un cas d'infanticide, il y a deux semaines ».
« Le juge a décidé que la punition pour un infanticide ne devrait pas être si sévère parce que le gouvernement n'a pas de loi contre l'avortement », précise-t-il.
« Je crois que je vais présenter une pétition pour retirer le financement de Planned Parenthood, mais je vais aussi organiser une pétition et d'autres choses dans mon comté pour que mes électeurs soient au courant de la situation et les informer de la situatoin qui préavaut au Canada à l'heure actuelle », conclut-il.
M. Trost dit qu'il s'oppose à l'avortement dans toutes les circonstances, mais qu'il est conscient que les Canadiens ne partagent pas son point de vue sur le sujet. Il n'en croit pas moins que le gouvernement ne devrait pas être apathique dans ce dossier et qu'il devrait adopter une approche « plus modérée ».
Trost invite les pro-vie à être plus agressifs
Dans une déclaration publiée sur son site Internet mercredi après-midi, M. Trost estime d'ailleurs que les Canadiens qui s'opposent à l'avortement doivent être plus audacieux dans leurs revendications s'ils veulent influencer la politique du gouvernement.
« Beaucoup, beaucoup de députés conservateurs pressent [le bureau du premier ministre] de cesser le versement de fonds », écrit-il. « Le financement fédéral a été arrêté pour un certain temps. Les fonds versés à l'IPPF ont été considérablement réduits. De plus, les subventions à l'IPPF viennent avec davantage de conditions. »
« Cela s'est produit uniquement en raison de la pression que nous avons appliquée. Cela a été une véritable victoire », écrit-il.
« Les politiciens pro-vie [NDLR : qui s'opposent à l'avortement] ont reçu une leçon. Le gouvernement ne répond aux inquiétudes et aux enjeux des pro-vie que lorsque nous adoptons une position agressive. Nous nous servirons de cette leçon ».
Dans le cas de l'IPPF, note Brad Trost, les députés ont commencé à plaider pour un retrait du financement en 2006, mais ils n'ont pas été écoutés parce que cela était demandé poliment derrière des portes closes. Les résultats ne sont venus qu'au moment où la campagne est devenue publique, dit-il.
Le bureau de Stephen Harper a répété mercredi soir que le premier ministre n'avait aucunement l'intention de rouvrir le débat sur l'avortement.
Le député saskatchewannais affirme lui-même que le premier ministre ne sera « pas emballé » par le fait de critiquer une décision d'une ministre du gouvernement, mais qu'il faut bien admettre que le caucus conservateur est divisé au sujet de l'avortement.
Le porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de Coopération internationale, Hélène Laverdière, soutient de son côté que l'avortement n'est pas un enjeu au Canada, mais que le débat semble néanmoins faire rage au sein du caucus conservateur.
« Les conservateurs doivent nous dire s'ils respectent le droit des femmes de choisir », affirme-t-elle. « Au Canada, à l'heure actuelle, les femmes ont le droit de choisir et nous ne comprenons toujours pas pourquoi les femmes dans les pays moins développés n'ont pas le même droit de choisir que les Canadiennes ».
Source : Radio Canada
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